A l’heure où la visibilité sur internet devient une priorité pour les entreprises, il est utile de rappeler les critères essentiels à la démonstration d’actes de concurrence déloyale du fait de l’imitation du nom de domaine d’un concurrent ; un rappel bienvenu par un arrêt rendu le 1er octobre 2018 par le TGI de Rennes.

En l’espèce, une société prétendait être titulaire de la marque française « Les Artisans Déménageurs ».

Elle exerçait également à partir du site internet www.lesartisansdemenageurs.com une activité de mise en relation entre particuliers et professionnels du déménagement.

Ultérieurement, une société exerçant une activité de déménagement a créé le site internet www.artisans-demenageurs.com sur lequel était présenté ladite activité.

Après avoir mis en demeure la seconde société de cesser toute utilisation des termes « artisans déménageurs », la première société l’a assigné, à titre principal pour contrefaçon de marque et à titre subsidiaire pour concurrence déloyale, du fait notamment de la grande similitude entre les noms de domaines de nature, selon elle, à créer une confusion entre leurs activités.

La demande principale en contrefaçon a été rejetée par le TGI de Rennes pour absence de qualité à agir, la société demanderesse n’ayant pas rapporté la preuve de la titularité des droits sur la marque française « Les Artisans Déménageurs ».

Restait alors à examiner la demande de condamnation de la société défenderesse à verser des dommages et intérêts sur le fondement de la concurrence déloyale.

Cette demande a été également été rejetée.

Cet arrêt est intéressant dès lors qu’il rappelle les critères permettant de conclure à des actes de concurrence déloyale dans le cas de l’imitation du nom de domaine d’un concurrent.

En l’espèce, le Tribunal rappelle que « le réservataire d’un nom de domaine ne peut reprocher à un tiers de faire usage d’un signe postérieur, identique ou similaire au sien, qu’à condition d’établir l’existence d’une faute préjudiciable commise par ce tiers ».

Sur ce, les juges relèvent à juste titre que « si le nom de domaine n’est constitué que d’un terme générique ou descriptif, son utilisateur ne peut faire grief à un tiers d’avoir commis une faute en utilisant le même terme afin de désigner des produits, services ou activités identiques ou similaires ».

Partant, dans l’arrêt d’espèce, le Tribunal juge que le nom de domaine utilisant les termes artisans et déménageurs, s’agissant d’une activité consistant à établir en ligne des devis de déménagement et à mettre en relation le candidat au déménagement avec l’un des déménageurs membres du réseau est purement descriptif et ne présente aucun caractère distinctif.

Pour rejeter définitivement la demande en concurrence déloyale et ne pas risquer d’être infirmé en appel, le Tribunal prends par ailleurs soin de noter qu’il ne peut par ailleurs avoir de risque de confusion entre les sites du fait, qu’en dépit de leur identité d’activité, leur apparence est très différente.

En effet, la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser dans un arrêt du 6 décembre 2016 que « l’action en concurrence déloyale étant ouverte à celui qui ne peut se prévaloir d’un droit privatif, le caractère original ou distinctif des éléments dont la reprise est incriminée n’est pas une condition de son bien-fondé, mais un facteur susceptible d’être pertinent pour l’examen d’un risque de confusion ».

En l’espèce, en dépit du caractère descriptif des noms de domaine, la demande en concurrence déloyale aurait pu être retenue si d’autres éléments/facteurs avaient pu permettre de conclure à un risque de confusion, tels que, par exemple, la grande similitude entre les sites auxquels les noms de domaine en cause donnaient accès. Mais tel n’était pas le cas en l’espèce.

 

Références : TGI Rennes, 2e Ch. Civ., 1er octobre 2018, Ariase Group / GV Communication, M. X. et Picard Déménagement